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Photo du rédacteurLe Fantôme de la liberté

Dževad Karahasan tire sa révérence


Dževad Karahasan






Le grand écrivain et dramaturge bosniaque Dževad Karahasan, conteur et penseur lucide, auteur de nombreuses œuvres, grand passeur entre Orient et Occident est décédé à Graz à l’âge de 70 ans. Passeur de frontières permettant le dépassement durable des frontières politiques aussi bien que culturelles, toute l’œuvre de Karahasan procède à une explicitation littéraire, à une présentation romanesque des cultures et de leurs enjeux.

Né en 1953 à Duvno, le jeune Karahasan fréquente le lycée à Sarajevo, puis bénéficie des leçons d’un moine franciscain qui lui enseigne philosophie, grec et latin. En 1986 il passe sa thèse à Zagreb finançant ses études en allant travailler, comme tant de Yougoslaves à l’époque, en Allemagne. Sujet de cette thèse : les modèles littéraires utilisés par l'écrivain croate Miroslav Krleža dans sa trilogie Le Cycle des Glembay.

Le prurit nationaliste, la guerre et le Siège de Sarajevo poussent Dževad Karahasan s’établir en 1993 à Graz, sans jamais cesser d’effectuer des allers et venues entre la Bosnie et l’Autriche. Il a travaillé en tant que dramaturge et a enseigné à l'Académie de l'art dramatique de Graz, la Faculté de philosophie de Sarajevo et l'Université de Göttingen.

Il a composé une vingtaine de pièces de théâtre et une quinzaine de romans et d’essais. Récompenses : Prix de rédaction européen Charles Veillon (1994, pour Un Déménagement), Prix Bruno Kreisky des livres politiques (1995), Prix Herder (1999), Prix du livre de Leipzig pour les relations européennes (2004), Prix Vilenica (2010), Médaille Goethe (2012), Prix Goethe (2020).

Dans Le Divan oriental (1989) il y retrace l’histoire très incarnée et psychologiquement riche du grand sage soufi al-Hallaj, auteur de sentences et d’aphorismes flamboyants et fulgurants – et crucifié par les autorités de Bagdad en 922. Les pièces et les romans de Karahasan portent parfois sur des personnages musulmans, parfois sur des chrétiens, et se déroulent souvent dans cette jointure tragique et féconde où les deux se rejoignent, en s’affrontant ou en dialoguant, comme dans La Roue de Sainte Catherine, ou encore L’Age de sable.


"Plus de cours ni porches ouvertes, plus d'interstices et passages de transition, aujourd'hui du lit on saute directement dans rue. Notre vie se découle dans les vitrines des magasins, subie des coupures nettes, plus de place dans notre monde pour l'intimité et les ombres."



RIP




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